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LE DERNIER COL
3 novembre 2006

5ième étape : Vallon Pont d’Arc - Marseille.188 Km. Samedi 10 Septembre 1994

5ième étape : Vallon Pont d’Arc - Marseille.188 Km. Samedi 10 Septembre 1994 Sur le panneau, à l’entrée de la ville, on peut lire : « Marseille - Commune d’Europe – Jumelée avec Hambourg, Gênes, Haïfa, Abidjan, Kobé, Dakar, Odessa, Le Pirée, Alexandrie ». Après 5 jours, un instant de gloire. Départ 07h40 Arrivée 15h30 Météo : « D’Avignon à Martigues, c’est un léger vent qui me pousse » Il a fait très beau toute la journée. Il a aussi fait très chaud. Une légère crainte s’est pourtant installée dès le départ par la présence d’un banc nuageux assez imposant jusqu’aux gorges de La Cèze. J’ai bien cru rejoindre Marseille accompagnée par le gris du ciel et la pluie mais ces nuages matinaux ont vite disparu. C’est en effet dans la vallée du rhone que le beau temps s’est installé pour la journée. Le vent est resté faible et pour une fois je peux profiter de cette rare accalmie. D’Avignon à Martigues, c’est un léger vent venant du nord-ouest qui me pousse sous un ciel immensément bleu et clair. Physique : Ma condition physique est bonne. Elle tends à s’améliorer à mesure des étapes. Comme la journée d’hier, je ne ressens ni lourdeur dans les jambes, ni fatigue générale. Le port du sac à dos ne me gêne pas non plus. Mon potentiel me laisse libre choix dans la gestion du temps de parcours. Cette maîtrise me permet donc de progresser comme je le souhaite : je peux ainsi consacrer plus de temps que prévu à apprécier certains sites au lieu comme on dit « de rouler tête dans le guidon ». Le temps perdu à tel endroit sera de toute façon rattrapé ailleurs. Cependant, en fin de parcours à hauteur de Marignane,des douleurs se font sentir aux fessiers. Elles me pénalisent pendant quelques kilomètres. Je n’étais pas équipé à cette époque d’un gel de selle. Je me sens bien, aguerri et en pleine possession de mes moyens. J’éprouve un réel plaisir à évoluer ainsi. Je pense même que j’aurais pu continuer sur une distance plus longue encore, quitte à laisser Marseille derrière soi ! Performance : « ce plaisir me fait oublier les difficultés du premier jour » Une fois encore tous les endroits ont été atteints dans les délais. Il s’agira pour certains d’un détail mais qui en fait à son importance. Il peut mesurer l’impact des handicaps rencontrés ou la sensation d’avoir « galéré » mais aussi de gérer son parcours lorsque la distance est longue. D’une manière générale, j’ai le sentiment que mes performances ont été assez élevées. C’est la première étape pour l’instant qui valorise la vitesse. Il faut dire que les reliefs sont quasiment inexistants après Bagnols-Sur-Cèze. Jusqu’aux gorges de La Cèze 22-25 Km/h, maxi 27 à cause des reliefs Des gorges à Bagnols-Sur-Cèze 32-35 Km/h De Bagnols à Marignane j’accuse très souvent 35-37 Km/h Ces performances n’ont pas altéré ma condition physique malgré les efforts dans l’étape du Massif Central sur un fort relief et les 2 premières journées jusqu’à Clermont-Ferrand sous un vent contraire violent. Elles sont le résultat d’un entraînement régulier et d’une bonne récupération. À rouler ainsi, ce plaisir me fait oublier les difficultés du premier jour entre Montargis et Cosne-Sur-Loire ! Moral : « Ma satisfaction est pleine et entière ! » Marseille à 5 jours de la Seine-et-Marne, le Massif Central à 2 jours, des paysages forts, des sensations garanties. Que demander de plus ! Ma satisfaction est pleine et entière ! De plus la météo est annoncée stable pour plusieurs jours. Cette performance est honorable mais il faut savoir rester humble et lucide même si le matériel est fiable, même si le potentiel permet de faire face aux difficultés. Ce premier objectif atteint il en reste en effet un second et dernier de même ampleur : le retour Relief : Le relief divise le parcours en deux parties séparées par la vallée du Rhône. On trouve la plus forte concentration de relief jusqu’à Bagnols-Sur-Cèze : une succession de multiples cotes et de descentes, dans un massif forestier assez dense et fermé, entre Barjac et St-André-de-Roquepertuis sur la route de la Cèze. Les amateurs de vitesse, comme ceux qui préfèrent s’échauffer tranquillement, se feront plaisir sur les longs plats entre Vallon, Vagnas et Barjac. Une fois dans la vallée du Rhône, on évolue le plus souvent sur du plat. Les reliefs sont très localisés et ne sont d’aucun handicap : on ne fera que longer le massif Les plaines et la montagne du Défends entre Cavaillon et Salon-de-Provence. Au sud de Salon, au 13ième Km sur la N113, un point de vue au somment d’un massif sans nom nous fait dominer la plaine de l’étang de Berre. La chaîne de l’Estaque est le relief le plus important avec le massif forestier de la Cèze. Il sera sans difficulté malgré la distance parcourue. La partie la plus pentue est sa façade maritime. Paysage - Curiosité : « Aux confins du Gard et de l’Ardèche » Au petit matin, de Vallon-Pont-d’Arc à Barjac, je ressens la même sensation qu’au départ du Puy-en-Velay vers le mont Mézenc : Je ne suis pourtant pas parti aux aurores et tout autour me semble encore endormi et silencieux. L’Ardèche reste calme et froide. Pas une onde sur l’eau, pas une vibration dans les arbres. Je m’aperçois en plus que je suis presque seul sur la route. Rares sont les gens décidés à sortir en ce samedi matin brumeux et frais : Vallon et Salavas sont restés endormis. À rouler seul dans cette ambiance matinale, on a l’impression d’être le témoin privilégié, de posséder et de faire partie de tout ce qui entoure. La partie la plus intéressante du parcours s’étire de Barjac à Bagnols-Sur-Cèze. Ma route me conduit vers les gorges de la Cèze dans une région isolée au relief accidenté. Nous sommes au sud des célèbres gorges de l’Ardèche. Aux confins même du Gard et de l’Ardèche. Dans l’enchevêtrement de collines boisées, souvent abruptes, on a ce double sentiment par l’isolement et l’aspect difficilement pénétrable, d’etre au bout du Monde et que tout reste finalement à découvrir : des dolmens cachés aux grottes préhistoriques de la Cèze, les ruines du château de Fèreyrolles, ces hameaux et ces villages perdus dans la garrigue sur des petites routes de nulle part. À l’entrée des gorges, on trouvera Montclus, un superbe petit village dominant la rivière. Un bout de civilisation planté au beau milieu des collines et des forets. De grandes maisons aux murs d’ocre sont bâties autour du château médiéval dont il ne reste que des vestiges. La Cèze prend naissance sur le mont Lozère dans les Cévennes et se jette dans le Rhône. Elle est moins connue que sa grande sœur l’Ardèche. Elle est aussi moins prestigieuse au regard. Pourtant l’écrivain Jean-Pierre Chabrol écrit d’elle : « un rayonnement, un chatoiement d’ombres et de lumières dansantes, à lui seul un heureux univers de fraîcheur et de liberté ». Elle taille son chemin dans un étroit canyon flanqué de part et d’autres de falaises abruptes. La route qui la longe est elle-même très étroite. Elle se faufile parfois autour de blocs de rochers verticaux et tordus. À la sortie de ce défilé sauvage apparaissent un relief dégagé, des collines dépouillées, puis des vignes et vergers, châteaux et villages. Elle marque la limite ou l’Homme a cessé de mettre son empreinte. Dans ce désert de rocailles et d’herbes sèches, on retiendra les deux beaux villages de Saint-André-de-Roquepertuis et Goudargues. Plus loin La Roque Sur Cèze, comme Monclus d’ailleurs, se doit d’être considéré comme une petite merveille : ce village aux vieux murs de pierres et piqueté ce cyprès grimpe sur un piton rocheux au milieu d’une nature encore préservée. Au pied des bâtisses la Cèze vient s’enrouler dans un jeu de cascades le long des vignes. Un rare village au charme d’autrefois. Un village comme on les aime. De Bagnols-Sur-Cèze à l’Estaque, la route me laisse peu de saveur paysagère. J’ai décidé dans la construction de mon parcours que cette 5° journée serait un tracé direct. Dans la vallée du Rhône à Avignon, le long de la Durance à Cavaillon puis aux abords de l’étang de Berre je paie alors le prix par cette absence de route pittoresque, de paysage à contempler, de petits détails accrocheurs qui rendent l’œil contemplatif. Je me fais quand même plaisir le long du canal de Craponne au nord de Salon-de-Provence ou ma route s’engouffre sous plusieurs kilomètres de voûtes d’arbres. « Puis d’un coup Marseille » La chaîne de l’Estaque est le relief le plus important avec les gorges de la Cèze. Il est aussi le dernier relief franchi. Celui au sommet duquel j’aperçois la Méditerranée s’étirer sur tous les horizons. Du haut de mon point de vue au lieu dit Le Rove, je distingue Marseille plus loin sur ma gauche, une forme en filigrane le long de la cote. Je ne distingue pas tout de la ville située à 13 ou 15 Km. Je me lance dans la dernière et grande descente que m’offre la N568. Sur ma droite, la rade dessine son arc de cercle. Je passe un tunnel creusé dans la roche puis déboule à toute allure sous une voie de chemins de fer. Un bras de mer entre aperçu sous les arcades. Encore une cote lointaine. Puis d’un coup Marseille. J’immortalise l’événement par une photo. Sur le panneau, à l’entrée de la ville, on peut lire : « Marseille - Commune d’Europe – Jumelée avec Hambourg, Gênes, Haïfa, Abidjan, Kobé, Dakar, Odessa, Le Pirée, Alexandrie ». Après 5 jours, un instant de gloire. « La traversée de Marseille s’est révélée épique » Avant d’entamer la descente de la chaîne des Estaque j’ai dû m’arrêter dans un petit bar au lieu dit Le Douard pour réapprovisionner en eau : il a fait très chaud et mes bouteilles sont vides. Vide mais pas uniquement à cause de la chaleur : j’ai dû les utiliser pour me débarrasser de deux caniches. Deux caniches cons. Alors que je cherchais ma route dans les pavillons de Gignac-La-Nerthe, ils me surprennent puis reviennent sur moi, l’un à ma droite, l’autre à ma gauche excités comme fous. Au bout de plusieurs minutes de ce jeu, je décide d’en taper un avec la pompe à vélo mais cela n’a que peu d’effet. L’un d’eux s’approche de moi au plus près, aboyant, l’œil mauvais et le croc visible. Pour m’en débarrasser définitivement, je sacrifie mes deux dernières bouteilles d’eau. Mouillé comme tel il devrait fuir mais cela les excite encore plus ! Encore un peu il me mordait un bout de jambes ! L’odeur d’une grillade détourne soudain leur attention : ils se rendent aussi fous et hurlants dans le jardin d’un pavillon. Un silence se fait. Puis ils fuient la propriété poursuivi par un chien de garde. Ils m’ont fait perdre un bon quart d’heure, ces deux caniches les plus cons du Monde ! La traversée de Marseille s’est révélée encore épique entre l’Estaque et La Madrague. Je n’avais aucune carte précise et je me dirigeais en suivant la direction du vieux port. Je me rappelle du panneau : « vieux port – route verte » (route verte pour route touristique). Suivez la flèche ! Un petit panneau que j’ai perdu à un carrefour : sur ma gauche, ma route partait dans des pavillons, sur ma droite elle finissait dans l’immense port commercial et son contrôle douanier, devant moi elle rejoignait une route qui partait droit sur Marseille. Je m’engage donc tout droit. Après avoir rouler 700 mètres, je me rends compte qu’elle devient une voie express. Je suis sur un tronçon de l’A7, l’autoroute du soleil ! Sans possibilité de dégager ni par la droite, ni par la gauche, je suis obligé de m’en sortir en faisant demi-tour. Je roule donc à contresens sur l’A7 en me serrant au maximum sur la gauche le long du mur. La voie des véhicules lents me porte chance : je n’en croise aucun sur ces 700 mètres ! Je suis hébergé cette fois-ci chez un couple d’amis, Marc et Sibille. Je passerais le Dimanche avec eux avant de repartir Lundi matin sur la route du Nord. L’après-midi n’est pas de tout repos : encore du sport ! On rejoint un site d’escalade où Marc a l’habitude de s’entraîner avant de partir dans les Alpes former avec mon frère une cordée sur les cascades de glace et autres terribles ascensions. Je me tente sur quelques blocs en faisant tout de même attention : Une blessure m’obligerait à rentrer en train et je préfère l’éviter. Leur appartement est proche de la Canebière. J’en profite pour entamer une ballade matinale sur ses alentours. Notre Dame de la Garde m’offre une belle vue panoramique : le fort Saint-Nicolas, le fort Saint-Jean, le Vieux Port et la cité marseillaise, millénaire de 20 siècles. Au sud le château d’if se laisse apercevoir sous un ciel bleu. Au nord se dessinent les contours de la chaîne de l’Etoile et la pointe du pic de Garlaban.
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